
Et de quoi rêve le frère Tutu ?
Je n’ai pas de secrets, aucun secret n’est nécessaire, surtout à l’heure où beaucoup s’inspirent, voire recopient grossièrement ce qu’ils voient sur la scène du voisin… Tout ce qui comptait, c’est que, le jour J, ce soit marquant et inoubliable… et que cette sensation, ils l’aient ressentie à mon concert en premier (rires).
Pour la Cigale, c’est la première fois que j’ai complètement décidé dans ma tête ; jusqu’alors, j’étais davantage soumis à une contrainte budgétaire.
Du coup, équipe réduite ; pour les lumières, je ne pouvais pas encore amener quelque chose d’extraordinaire. Par contre, j’ai la chance de rouler avec des bons bricoleurs, des petits geeks, qui ont pu faire des trucs sympathiques. Donc, niveau esthétique, ce n’est pas encore Tuerie à 100 %, mais on avance !
Alors que là, on a enfin pu mettre les pieds dans ma chambre. Et ma chambre, c’est le Sunday Service !
C’est mon inspiration principale visuellement. Au niveau du son, on est sur autre chose, donc poursuivez la lecture.
Ce que je voulais proposer, c’est un nuage dans une Cigale, comme on l’a rarement vu. À part peut-être lors de combats de boxe avec une scène centrale. La scène centrale, c’est quelque chose de plus en plus courant, les gens commencent à s’habituer à cette configuration grâce aux artistes américains, ou encore avec une émission comme « Dans le Club » sur Arte, cette fois sur une petite plate-forme.
Me concernant, c’était un peu plus grand ; je voulais me retrouver dans un aquarium, et tout autour, je voulais de la fumée froide ; je voulais qu’on ait tous les pieds dans cette fumée. Pour la lumière, encore une fois, j’ai puisé mon inspiration dans les Sunday Service de Kanye, quand Kanye va bien !
Donc, quand ça tire vers le bleu, le blanc et l’écru. En fait, je voulais quelque chose de très pâle ; par moments, on a des couleurs chaudes, proches d’un lever ou d’un coucher de soleil. Mais globalement, c’était froid, il fallait que la Cigale soit blanche, finalement.
Si le Sunday Service m’inspire essentiellement visuellement, au niveau du son, c’était plus Chance The Rapper ; pas les voix, mais la section d’instruments cuivres.
Je voulais aussi une chorale gospel, mais ça crée moins la surprise aujourd’hui car c’est de plus en plus utilisé par d’autres artistes. Donc j’ai laissé et j’ai davantage axé sur un niveau d’exigence plus élevé pour les musiciens. Clairement, j’ai basculé côté “Fanfare”, en essayant de ne pas dénaturer l’esthétique gospel.
Donc pas de chorale cette fois-ci, mais au profit de deux monstres que je voulais absolument avoir, qui sont Eddie & Jaz, respectivement batteur et arrangeur d’Aya Nakamura, entre autres. J’avais besoin d’eux parce qu’ils ont une manière de « taper ». Leurs arrangements sont américains. Le souci que j’ai, c’est que dès que j’entends des projets basculer « en mode live », ça sonne « rock ». Ce n’est pas ce que je recherchais.
Tout ça en gardant bien l’objectif, car le show ultime Tuerie “version finale”, ce serait une sorte de Late Orchestration de Kanye West, mais avec plus de « bounce ». C’est une version live du deuxième album de Kanye West, « Late Registration », à Abbey Road Studios.
Pour la set-list, j’ai imaginé ça comme un voyage ; on a voyagé ensemble, il pouvait se passer tout et n’importe quoi, ça dépendait de moi, mais aussi d’eux et de leur énergie, et ils ont été largement à la hauteur. J’accompagne tout le monde, évidemment, et j’interviens par moments comme un steward qui expliquerait les consignes de sécurité.
Certains de mes morceaux commencent à dater et pour que je puisse encore prendre du plaisir à les partager, j’ai dû “les tuer”. Il le fallait pour leur donner une dernière vie possible avant de leur dire au revoir.
C’est ce qu’on a fait, tous ensemble, et cela a été un des meilleurs moments de musique depuis que j’ai commencé tout ça.
Cet article est à retrouver dans l'édition 02 de La Gazette du Palace.